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Sirop de griotte
3 mai 2007

Royal déborde, Sarkozy écope

«Aimons nous les uns les autres» psalmodiait Ségolène à Charléty. Elle ne comptait ni dans ces uns ni dans ces autres Nicolas Sarkozy: hier, il a fini par «révolter» la reine du Poitou qui n’avait "pas envie de se calmer". Seule action d’antijeu d’un débat finalement assez prévisible, plutôt «physique», mais sans occasions franches et peu de tirs cadrés. Loin de Milan. sego_sarko_debat_avrilLégère embardée hier soir dans un débat un peu longuet entre la prétendante et le favori. Ségolène aura tout tenté pour énerver Nicolas, mais celui-ci avait bien préparé son affaire, l’homme de Neuilly est resté maître de lui-même, peu transpirant pour une fois, et renvoyant systématiquement les revers de la candidate par des lifts astucieux (même si un peu téléphonés parfois). A chaque fois que Royal pointait un détail troublant dans les déclarations du candidat UMP, celui-ci l’accusait d’être « méprisante ». Légèrement condescendant, il réussissait alors à merveille à endosser l’habit de victime, d’autant plus que le ton cassant et le sourire absent de son adversaire appuyaient plutôt ses déclarations. Oui Ségolène apparaissait un peu tendue, sur les bords, et le sourire perdu dans la concentration, sans doute. On la sentait d’entrée de jeu très appliquée, très attentive, s’efforçant de ne pas tomber dans la bourde. En un mot, bien moins à l’aise que Sarkozy, plus habitué à l’adversité, sans doute, plus rodé aux manœuvres, aux coups bas et aux chausses trappes. Etre haï de longues années durant par le clan Chirac vous forme aux batailles. Mais de bataille il n’y eut pas vraiment, hier soir. Juste, à tour de rôle, chacun des candidats exposant son programme, d’un timbre plus alerte il est vrai, plus jeune, ça va sans dire, que celui entendu lors des derniers grands débats présidentiels. On était loin, très loin, des Chirac Mitterrand ou des Mitterrand-Giscard, très loin même du Chirac-Jospin de 2002. On était incontestablement dans la modernité, avec ce qu’il faut d’élan, de rythme, pour ne pas s’endormir deux heures et demi durant. (Ne pas s’endormir, soit, mais pour ne pas zapper, il fallait exécrer le football, tant l’autre grand débat du soir, entre Milan et Manchester sur Canal+, fut somptueux.) Et puis, comme dans chacun de ces grands débats, il y eut le « monopole du cœur » le « les yeux dans les yeux, je le conteste », le « vous avez tout à fait raison monsieur le Premier ministre » version 2007. L’accrochage qui fait l’incident. C’est Sarkozy en train d’évoquer la nécessité d’une réforme permettant à tous les enfants handicapés d’intégrer un établissement scolaire classique (40% d’entre eux aujourd’hui, seulement, accèdent aux établissements traditionnels). Jusque là rien de scandaleux de la part de l’ancien ministre de l’Intérieur que d’utiliser un exemple « émouvant », un poil « tire larme » pour expliquer une partie de son programme concernant l’Education. Rien de scandaleux, non, mais quelque chose « d’immoral » selon Ségolène Royal, qui prend là un air plus sentencieux que jamais pour tancer son concurrent, coupable selon elle de se servir de drames humains terribles à des fins politiciennes : « Jouer avec le handicap comme vous venez de le faire est scandaleux", "c’est moi qui ai créé le plan Handiscol pour accueillir les enfants handicapés."J’avais créé 7 000 places d’aide-éducateur d’accompagnement et c’est votre gouvernement qui a supprimé les aides éducateurs et le plan handiscol. Vous le savez parfaitement !" s’indigne alors la candidate, très remontée, avant de prévenir son vis-à-vis que, non, « tout n’est pas possible, en politique ». Sarkozy ne répond rien, avant de lui demander pourquoi elle s’énerve, ce à quoi elle répond que parfois certaines colères sont salutaires ; lui, répète qu’il ne faut pas s’énerver, qu’il faut qu’elle se calme, « non je ne me calmerai pas » répond Ségolène, « il faut savoir garder ses nerfs quand on brigue la plus haute fonction » lui répond en substance Sarkozy, en lui répétant de ne pas s’énerver, « je ne m’énerve pas, je me révolte » finit par trouver Royal, un peu emportée par son emportement. Un bon petit moment pour le zapping, mais aussi le comble de la mauvaise foi pour madame Royal, reprochant à Sarkozy de « jouer avec le handicap » alors qu’elle-même, quelques questions auparavant (pour illustrer le fait qu’elle ne souhaitait pas réduire le nombre de fonctionnaires, mais au contraire augmenter les effectifs) elle-même donc avait utilisé un fait divers récent, et sordide, le viol d’une jeune femme policier près du commissariat de Bobigny. Selon madame Royal, si cette femme avait été raccompagnée, le drame ne se serait pas produit. Ce à quoi Sarkozy lui a répondu que si elle envisageait faire raccompagner toutes les femmes fonctionnaires de police qui rentrent tard le soir, il faudrait créer beaucoup d’emplois ! (et avec quel argent ?) Bref, dans ce cas-là, pour justifier sa politique d’élargissement de la fonction publique, madame Royal, en toute immoralité, a exploité à ses fins, sans vergogne, un drame épouvantable, qui n’avait peut-être pas tout à fait sa place dans ce débat. A immoral, immorale et demi. Un partout, la balle au centre : l’incident clos (difficilement, PPDA et Chabot ayant du mal à maîtriser le temps de parole de madame Royal) la discussion put reprendre en toute civilité, en toute « chien de faiencité », sans plus de débordements. Juste quelques mises au point nucléaires par ci, européennes par là, sans émois. Royal aura donc perdu son pari : elle n’a pas réussi à énerver Sarkozy. Lui aura perdu le sien : il n’aura pas réussi à prendre en défaut Royal, sur aucun dossier. Mais l’international, il est vrai, n’est venu qu’en fin de débat, entre la poire et le calva, pas le temps pour tester la géographie, ni l’Histoire. Le seul petit point de démarcation qu’on peut donc accorder à Sarkozy vient de cet échange un peu vif, dans lequel c’est incontestablement la dame en blanc et noir hier soir qui s’est plantée : l’image qu’elle a donnée à ce moment-là a plutôt une nouvelle fois correspondu à celui d’une femme dure, autoritaire, un poil professorale, trop dans l’affectif pour endosser l’habit de présidente de la République. Par moment, Sarkozy est allé un peu trop dans la condescendance, c’est vrai, mais trop de fois Royal est apparue très nerveuse, tellement désireuse de provoquer une réaction excessive de son adversaire qu’elle paraissait toujours à la limite de la maîtrise. Les indécis présents devant le poste ont donc vu un affrontement assez soft quand même, entre une candidate pas très sûre d’elle-même, de sa tactique et de sa place, et un candidat plutôt à l’aise dans ses idées, obnubilé par son objectif, ne mégotant même pas sur le temps de parole. Une challenger, un favori. Ce débat, en somme, très attendu, très regardé, n’aura pas changé la donne. Bayrou dirait sûrement que les lignes n’ont pas vraiment bougé. En effet. Un seul débat, même long, ne suffit sans doute pas à départager deux candidats. Trop préparés, trop briefés, ces derniers récitent leur partition, ni plus ni moins, sans souci de vérité, juste avec l’angoisse de ne pas gaffer. Ne pas déraper. Deux ou trois débats la dernière semaine de campagne seraient sans doute bienvenus si on voulait vraiment que ce genre d’exercice serve à quelque chose. Ségolène Royal pouvait espérer rattraper son retard. Sa très surjouée crise de révolte restera seule dans les archives. Guère à son avantage. Article trouvé sur Agora vox le 03/05/07 5nmbtivbc5a4ivjebyfgziuztL162021
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